Quand les distributeurs français montrent aux blogueurs les films à venir, nous, on regarde les blogueurs.
Un line-up : ce mot barbare et jargonneux, en dehors de signifier la toute-puissance de la culture anglo-saxonne sur l’industrie, désigne le moment dans l’année où les studios et les distributeurs présentent leur programme pour les 12 mois à venir. Le 7 octobre dernier, c’est avec un mélange d’enthousiasme et d’anxiété que les membres de la profession la plus mise à mal par le streaming et le téléchargement illégaux ont soumis aux blogueurs plusieurs dizaines de films. Cela a été aussi l’occasion de faire un peu de sociologie entre deux sessions de bandes-annonces en observant aussi bien la blogosphère cinéma que les distributeurs eux-mêmes. Les blogueurs étaient venus en nombre important alors que nous nous attendions à seulement une poignée d’entre eux. Cette foule donne une idée de l’éclatement de la parole écrite sur le net. Laurent Cotillon, rédacteur-en-chef du Film Français et maître de cérémonie plutôt élégant, s’est lui-même étonné du nombre croissant de participants depuis le précédent Showeb (le nom de la convention qui en est à sa seconde édition). Premier détail à noter : la plupart des participants étaient bruns, ce qui n’a aucune importance. Ils étaient de formes et de couleurs très différentes les uns des autres, cela n’a pas d’importance non plus. La moyenne d’âge avoisinait les 30 ans et moins, c’est déjà plus significatif. Le test de Bechdel est positif : il y avait beaucoup de personnages féminins portant des noms et parlant d’autre chose que d’un homme, bien que nous ne verrons aucun film réalisé par une femme ce jour là. Juger les gens à leur apparence c’est pas bien, et pourtant, à leur allure, il semblait qu’une majorité de ces blogueurs étaient des représentants de la culture geek, dominante sur le web. Un élément en fin de journée attestera de la justesse de cette intuition.
Les distributeurs reconnaissables uniquement à leur âge parfois à peine supérieur (leur look les distinguait peu des blogueurs) se comptaient sur les doigts des mains, mais la quantité de films présentés dépassait notre capacité à les retenir tous. D’autant plus qu’il était difficile de prendre des notes dans l’obscurité de la salle de projection, et aucun distributeur n’a pensé à fournir une version papier de son programme. Aussi nous ne rendrons compte que de ce qui nous a paru, selon notre sensibilité, des temps forts. Tout d’abord, la diversité des long-métrages cassait un peu notre préjugé sur le caractère geek de ce Showeb. Certains des distributeurs étaient des vieux briscards du métier, comme Universal, Pathé, Europa Corp ou Le Pacte, d’autres presque complètement nouveaux comme The Jokers ou Urban Film Distribution. Gebeka Films nous a montré les premières images de deux films d’animation très intéressants à plusieurs titres. Le premier, 108 Rois-Dragons est une coproduction franco-chinoise distinguée par un style unique, très éloigné de ce qui se fait depuis que Pixar domine le secteur. Le second a fait verser quelques larmes de nostalgie à ceux qui se souviennent de ces personnages : Les Moomins sur la Riviera, une autre co-production, cette fois avec la Finlande, adapté de l’oeuvre de Tove Jansson. Les Moomins avaient déjà connu une adaptation en série d’animation pour la télévision au début des années 90, et Dieu-qui-n’existe-pas merci, ce long-métrage d’inspiration sociétale (les héros passent de leur milieu rural à celui de richards voulant péter plus haut que leur culture) a été réalisé en animation traditionnelle. Ce qui n’est pas du tout le cas d’Astérix et le domaine des Dieux d’Alexandre Astier. Coïncidence, ce film en images de synthèse aborde la même thématique que les Moomins, transportant les Gaulois dans un milieu qui n’est pas le leur, faisant d’eux ce qu’on appelle communément en Gaule de gauche des « social-traîtres ». Les longs extraits que nous avons pu voir nous ont convaincu que de toutes les dénaturations qu’a subi dernièrement l’oeuvre d’Uderzo au cinéma, celle d’Astier est la plus fidèle au matériel d’origine, et cela malgré, on le regrette, le traitement en volume.
Question films français de souche, avec des acteurs en chair et en os, les distributeurs sont restés sur des genres « traditionnels », à savoir la comédie, le policier et le drame. L’affaire SK1 pour « Sérial Killer 1 » est l’histoire vraie de la traque et du procès de Guy Georges, ce tueur en série qui défraya la chronique dans les années 80 en France. Raphaël Personaz incarne l’enquêteur principal tandis que Nathalie Baye joue l’avocate du tueur. Les deux protagonistes sont pris dans un conflit insoluble et intense. Confrontation également dans La French, entre une figure du milieu marseillais et un super-flic dans les années 70. Il fallait deux comédiens de grande stature pour ce duel au soleil du midi, et ce sont Dujardin et Lelouche qui se coltinent la tâche difficile dans cet autre polar inspiré de faits réels. Mauvais point pour le showreel, la très longue bande-annonce de La French, qui à force de vouloir nous convaincre des qualités du film oublie que le blogueur-journaliste est aussi le premier spectateur. Et de dévoiler trop d’éléments de l’intrigue, même si l’histoire appartient à l’Histoire comme nous le fera remarquer un collègue. Pour détendre l’atmosphère après ces deux drames policiers, nous avons été exposés à la bande-annonce de A la vie avec une Julie Depardieu transformée. Amaigrie et fragilisée, la comédienne joue une rescapée de la Shoah dans un métrage inspiré de la vie de la mère du réalisateur Jean-Jacques Zilbermann (L’homme est une femme comme les autres). On y est témoin de la difficile rémission de trois survivantes d’Auschwitz, et l’impossibilité d’exprimer la souffrance vécue autrement que par le silence ou par l’humour. Heureusement, pour détendre vraiment l’atmosphère, La dernière leçon nous montrait une Marthe Villalonga en fin de vie soutenue par ses proches dont une Sandrine Bonnaire au sourire toujours aussi solaire. Heureusement, pour vraiment vraiment détendre l’atmosphère, nous avons eu droit à un lot de comédies de divers calibres. Evacuons tout de suite le Bis de Dominique Farrugia qui semble ne prendre aucun risque pour son retour à la réalisation : deux comédiens pesants (au box-office), Kad Merad et Frank Dubosc, interprètent une resucée d’un concept déjà resucé maintes fois et dernièrement dans le film américain La machine à démonter le temps où l’on voyait une bande de comédiens pesants revenir dans les années 80 et tenter de refaire leur vie, éventuellement le monde. Empêcheront-ils l’élection de Nicolas Sarkozy en 2007 ? Sûrement pas, vues les sympathies politiques du réalisateur ils auraient tendance à le faire réélire en 2012 puis en 17. On peut tromper une fois mille personnes, mais pas mille fois une personne (ou l’inverse). Plus original, Papa ou Maman, met en prise le désormais inénarrable Laurent Laffite avec l’inénarrable Marina Foïs, tous les deux d’accord pour divorcer sauf qu’aucun ne veut la garde des enfants. Un concept qui réjouira les partisans de « un papa, une maman, un garçon, une fille, un chien ». Une bande-annonce en trois volets a fait la promotion de Tiens-toi droite, film dans lequel on a pu mater l’auguste derrière de Laura Smet, tandis qu’on admirait une fois de plus le jeu d’acteur de Noëmie Lovski – qu’aucune des deux comédiennes n’en prenne ombrage : mieux vaut ça que l’inverse. Sous X est ce qu’on appelle dans le jargon journalistique un « film coup-de-poing ». A quoi on reconnaît un film coup-de-poing ? Facile : on y voit des voyous, des Noirs, des Arabes, et de la drogue dans une peinture réaliste de la société où des acteurs peu connus parlent comme dans la vraie vie. Jean-Jacques (Jean-Michel Correïa, également réalisateur) sort de prison après 9 ans et va retomber dans le biz de la cité ou, plus dangereux mais salvateur, affronter le mystère de ses origines, lui qui est né sous X (d’où le titre du film probablement). Notons que le scénariste est Nicolas Peufaillit, le bien nommé, co-auteur du film coup-de-poing Un prophète mais aussi de l’incroyable comédie zombie coup-de-poing Goal of the dead. Parmi les productions françaises dont on se rappelle, il y a Solidaires, totalement dans l’air vicié du temps, puisqu’il raconte sur le ton de la comédie la croisade en scréd d’employés d’un supermarché discount pour revendre à très bas prix des marchandises vouées à être jetées. Cette aberration moderne porte le nom de gaspillage alimentaire, et mieux vaut en rire avant que les frères Dardenne(s) s’emparent du sujet. On vous reparlera plus tard de Pourquoi j’ai pas mangé mon père une comédie anthropologique en images de synthèse adaptée du roman de Roy Lewis. C’est la première réalisation de Jamel Debbouze qui parasite totalement son sujet avec ses gimmicks et sa voix trop reconnaissables en même temps qu’il modifie le titre de l’oeuvre originale (Pourquoi j’ai mangé mon père) perdant en chemin le sens premier.
On s’est fait Mickey
Dans le domaine étranger, la diversité est à l’ordre du jour. Un homme du peuple d’Andrzej Wajda (88 ans) relate l’ascension de Lech Walesa en même temps que la chute du communisme à travers un portrait de l’homme dans sa vie privée – Walesa, probablement peu connu des jeunes générations mais artisan-ouvrier indispensable de ce monde plus libre aujourd’hui qu’il ne l’était avant 1989. La liberté c’est une lutte de tous les jours. Par exemple pour l’héroïne de Félix et Meira. Dans la communauté hassidique de Québec d’où elle est issue et cloîtrée, cette jeune femme déjà engagée dans une vie de couple et de renoncement, va devoir s’affranchir des interdits et tabous de son milieu pour pouvoir écouter de la musique, manger pas que casher, enlever cette perruque qui lui couvre les cheveux, et aussi pouvoir aimer qui elle veut. Vivre tout simplement, affranchie de la peur de finir dans un enfer (où brûleraient hommes et toreros défunts, par ailleurs). D’un intégrisme religieux à l’autre il n’y a qu’un pas et quelques milliers de kilomètres : Timbuktu du mauritanien Abderrahmane Sissako, présenté à Cannes en mai dernier, donne à voir l’obscurantisme qui s’est emparé de certaines régions d’Afrique ces dernières années et qui a relancé la communauté internationale dans la guerre perpétuelle contre une forme de terrorisme parmi d’autres. Le film sera bientôt dans nos salles, mais le cauchemar qu’il raconte est déjà sur tous nos écrans, hélas. On craint le pire pour The Theory Of Everything, l’histoire touchante, vraie et pourtant incroyable de Sir Stephen Hawking, comment il est devenu le cerveau le plus brillant de notre époque tandis que son corps subissait une horrible et lente dégénérescence. Le pire parce que le traitement saturé de l’image suggère une romance doublée d’un drame qui va nous tirer des larmes à tout prix. Ce qui est dommage car le comédien incarnant Hawking, Eddie Redmayne (Les Misérables), réussit son mimétisme tout en évitant l’imitation. The Imitation Game justement, c’est un film dont nous vous avons déjà parlé du fait de l’importance de son personnage principal, le mathématicien Alan Turing, dans l’histoire de l’informatique et donc dans nos vies quotidiennes. L’année dernière, Hawking faisait partie des signataires d’une pétition demandant à la Reine d’Angleterre de réhabiliter la mémoire de Turing, jugé et condamné à subir un traitement chimique pour le « guérir » de son homosexualité. Plus flou, mais beaucoup plus drôle, on retiendra la présentation de la société The Jokers qui a su employer une forme originale et le langage de la culture web d’aujourd’hui pour s’adresser aux blogueurs. Problème : on se rappelle de la présentation mais pas des films, sinon le teasing parlé de Ryan Gosling et Nicolas Winding Refn, et une promesse récurrente de « sexe et violence ». Du sexe et de la violence, il y en avait peu dans Paddington, les aventures d’un ourson à Londres. Contre toute attente, le résultat est prometteur et drôle, du moins c’est ce que nous a susurré notre âme d’enfant tout au fond de nous. Submergé par le nombre, on oublierait presque de vous toucher deux mots de Favelas de Steven Daldry (Billy Elliot), sorte de mélange entre Slum Dog Millionaire et La Cité de Dieu plus L’île aux fleurs. On a aussi aperçu en flash quelques images du Duc de Burbundy, troisième film de Peter Strickland, auteur du remarquable Berberian Sound Studio.
On n’est pas très sûr que Disney fasse partie du domaine étranger tellement la culture qu’il représente s’est répandue mondialement, d’autant plus qu’il a installé une partie de son royaume en plein cœur de la France, à Marne l’avalée. On ne va pas non plus aller jusqu’à affirmer que Mickey fait partie du patrimoine immatériel de l’Humanité, car en faisant main basse sur Pixar, Marvel et Lucasfilm et encore avant sur la quasi-totalité du répertoire des contes de fées et autres légendes des quatre coins du globe, c’est à dire tout un pan de l’imaginaire transgénérationnel et transculturel de ces 70 à 200 dernières années, il serait plus juste de dire que c’est le patrimoine de l’Humanité qui appartient, un peu, à Mickey. Placé dans l’agenda comme le clou du spectacle, Disney a donc occupé 45 minutes entières dans cette journée du Showeb 2014, non sans imposer ses propres règles. « A l’américaine » selon ses émissaires eux-mêmes confus et agacés par l’obsession sécuritaire du patron. Alors que les blogueurs n’avaient pas lâché une seconde leurs smartphones et portables pour tweeter chaque instant du Showeb, ils furent priés de déposer leurs armes à l’entrée de la salle et de signer un accord de confidentialité sous le regard pas ultra-sympathique d’armoires à glace genre men in black, de sorte à ne rien divulguer des images diffusées sinon pour « en dire du bien« . Puisque Mickey a peur de se faire piquer ses idées et de perdre le contrôle de sa promo, rendons-lui ce service : n’en parlons pas.
Thierry, l’affront
En vérité, le clou du spectacle c’était Thierry Frémeaux qui était à la hauteur de la promesse faite par Laurent Cotillon dans la matinée. Quand l’ancien délégué général du Festival de Cannes et actuel directeur du Festival Lumière parle de cinéma, on l’écoute, on boit ses paroles, on mange ses phrases. Frémeaux a honoré de sa présence les blogueurs-journalistes pour présenter un film-surprise qui nous a été projeté en cadeau dans une version restaurée en numérique. Seulement voilà, dès que le monsieur a annoncé que le film en question était César et Rosalie de Claude Sautet (1972), un bon tiers de la salle a littéralement détalé. Sans se laisser émouvoir par cet affront – nous aurions fondu en larmes à sa place – Thierry a raconté devant les véritables cinéphiles qui étaient restés, ce que César et Rosalie représente pour lui et pour l’Histoire du cinéma français tout en le replaçant dans le contexte socio-économique de la France d’avant le premier choc pétrolier de 1973 qui marquait la fin des « Trentes Glorieuses ». Aux apprentis cinéastes, aux blogueurs ayant des velléités d’écriture, il a demandé de bien observer le film et son scénario « écrit au cordeau« , tout en rappelant à la mémoire collective ce réalisateur que le culte de Truffaut (auquel la Cinémathèque rendait hommage le soir-même à quelques centaines de mètres de là) avait tendance à reléguer dans l’ombre. Et il a formulé cette étrange question : « demandez-vous qui, aujourd’hui, pourrait jouer les rôles tenus par Yves Montand, Romy Schneider et Sami Frey« . Est-ce que Frémeaux sous-entendrait que l’actuel cinéma français est un pâle reflet de ce qu’il était jusque dans les années 70 ? Est-ce que Frémeaux ne serait pas en train de nous dire, comme nous l’a asséné avec un grand mépris et des mots horribles en 1999 (dans un amphi blindé d’étudiants de la Sorbonne lors de la projection de Sicilia!, oeuvre parfaitement absconse) un certain Jean-Marie Straub, que nous vivons une époque de merde – si tu permets l’expression – pour reprendre les termes amicaux de Straub : une époque de « sous-culture », de « sous-bouffe » de « sous-pensée », et donc avec des sous-acteurs, un sous-cinéma et par ricochet, un sous-public. Une époque placée sous le signe des « sous » en quelque sorte, sous le veau d’or exactement. Nous avons réfléchi à la question de Frémeaux tandis que les images du film défilaient, tandis que Montand, Schneider et Frey nous enveloppaient de leur charisme, en fait un souvenir du cinéma et du temps de nos parents, tandis que Montand manipulait des liasses de billets, des Francs français, au même rythme qu’il laissait transparaître les fragilités de son personnage pourtant hâbleur, pendant que celui de Frey dessinait des planches de « comics » avec un Spiderman accroché à un mur de son atelier. Jusqu’à ce plan final où Rosalie-Romy ré-apparaît devant les deux comédiens qui se la sont disputée pendant une heure et demi, et qui malgré le fondu au bleu dans lequel elle se fond, fond, fond, continue de briller de milles feux, cent mille fois plus que le cul de Laura Smet. Aussi patrimonial et précieux soit-il, César et Rosalie est aussi un des films-matrice de ce cinéma français des années 80 et 90 qui nous a dégoûté du cinéma français à force de jouer sans fin cette variation sur les habitudes polygames et/ou polyandres de la petite-bourgeoisie qui écrit, fabrique et vend ces histoires-miroirs de son mode de vie. Alors nous est revenue cette déclaration de Joss Whedon, auteur-réalisateur de l’écurie Disney/Marvel adulé par une génération de scénaristes français biberonnés à Buffy et à la culture geek : « si je veux un film qui n’a pas de fin, je vais voir un film français, je considère cela comme une trahison de la confiance du spectateur » (Entertainment Weekly, août 2013, à propos de L’Empire contre-attaque). Et alors, quels acteurs pour remplacer Montand le haut-parleur sensible, Schneider la luminescente et sa manière unique de prononcer « Daavid », et Frey le brun-lover taiseux ? La réponse est apparue comme une évidence : Robert Downey Jr., Scarlett Johansson et Mark Ruffalo. Nous venions juste de les voir dans une bande-annonce dont on ne peut rien révéler.
En conclusion, bien que le panel de films présentés n’était qu’un échantillon de la production internationale, chaque spectateur trouvera son compte dans les sorties des prochains mois. Nous admirons ce qu’il est convenu d’appeler de l’audace, de la conviction, ou de la folie, de la part de certains distributeurs qui tentent leur chance avec des petits films face à des mastodontes autrement appelés blockbusters parce que leur but est d’exploser toute concurrence. Les animés de Disney, aussi sympathiques soient-ils, visent à détruire les Moomins ou Astérix, ou les deux, selon le calendrier décidé. La distribution est une profession de l’ombre, comme beaucoup d’autres dans le cinéma, et indispensable au bon fonctionnement de tout le système, de bas en haut, des créateurs au public en passant par la presse. Une presse qui prend une forme multicéphale ces dernières années puisque le nombre de blogueurs oblige les distributeurs, voire même les producteurs comme Europa Corp qui le confirmait, à repenser leur stratégie de communication. Au lieu des quelques dizaines de journalistes des médias majeurs d’avant le web, ils ont désormais affaire à des centaines de petits leaders d’opinion, relais de communication assez serviles et gratuits, dont ils ne peuvent se passer pour faire parler de leurs films dans ce vide effrayant qu’est souvent l’espace culturel du web. Cela s’est senti dans plusieurs interventions, des petits comme des grands acteurs du business, entre celui-ci qui demande à demi-mots de ne pas télécharger les films étrangers dont les droits sont plus difficiles et plus longs à obtenir sachant pertinemment que ces derniers sont disponibles sur les plateformes illégales des mois avant leur non-sortie française, cet autre qui suggère de ne pas crier trop fort sur Twitter si on n’aime pas son film, ou celui-là qui fait signer des accords de confidentialité avec une clause implicite qui autorise à en dire du bien uniquement. T’inquiètes Mickey, on n’a rien dit à personne au sujet d’Avengers 2: Age of Ultron dont le long trailer a presque déclenché une standing ovation, ni de Vice-Versa de Pixar la plus tordante des bandes-annonces vues ce jour.