C’est l’histoire de trois frères très différents. L’aîné est trafiquant de drogue, le benjamin noyé dans son adolescence, et le cadet poursuit des études de droit. Ils sont élevés par leur mère, une “mama” africaine et veuve. Car les trois frères sont noirs, et banlieusards. Le futur avocat prépare un concours d’éloquence pendant lequel il devra défendre l’Etat français contre une jeune femme blanche, blonde et bourgeoise qui elle aura le devoir de prouver la responsabilité de ce même Etat dans la détresse des banlieues. Inévitablement, le destin des trois frères va se croiser pour le drama et le drame.
Les bonnes intentions ne suffisent pas à faire un bon film. Pas plus que l’expérience dans le clip musical de la réalisatrice Leila Sy ne garantit un passage au long-métrage sans douleur. Au contraire, il est pénible de regarder Banlieusards. Si le matériau de départ est bon, ce qu’en font Sy et Kery James ne l’est pas. Mal écrit, mal joué, mal filmé, mal monté : heureusement que ça ne dure qu’une heure et demi. Quand bien même les situations sont inspirées du réel, la caméra les transforme en clichés. Ainsi le personnage de la mère sacrificielle ne sert à rien sinon à renforcer ce stéréotype. Plusieurs fois les réalisateurs parviennent à nous tirer de l’illusion (cf. suspension de l’incrédulité) du film en donnant à Mathieu Kassovitz un tout petit rôle. L’auteur de La Haine a pourtant perdu de sa stature depuis qu’il poste tout et n’importe quoi sur Twitter. Dans la scène “concours d’éloquence”, qui rappelle un autre film, les réalisateurs ont placé dans le public une vraie victime de violences policières, mêlant ainsi réel et fiction dans un jeu dangereux. Nous pourrions arrêter cette critique là si seulement Kery James ne s’était pas étalé dans les médias en criant à la censure par le cinéma français (“On ne voulait pas donner la parole à un noir”). “Pleurnichards” aurait probablement été un titre plus juste pour cet exercice extrêmement scolaire.
Banlieusards. De Kery James et Leila Sy. France, 2019.