Dans un bled paumé des Pyrénées, Teddy masse des pieds et des corps fatigués dans un salon tenu par une patronne libidineuse. Une nuit de pleine lune, il est mordu par un loup. Peu à peu, il est envahi de pulsions animales qui ne font pas bon ménage avec l’environnement ronronnant dans lequel il s’ennuie ferme.
De tous les films de genre français qui sont sortis en cette rentrée sous le signe de la Covid-19, Teddy est sans doute le plus réussi. Et cela est dû non pas au scénario qui se la coule douce. Le regard singuler propre aux auteurs, les frères Ludovic et Zoran Boukherma, rappelle de loin le cinéma des frères Coen. Cette vision se traduit par un casting particulier, la direction d’acteurs et jusqu’à l’image aux couleurs éclatantes. Les seconds rôles sont tenus par des comédiens amateurs, ce qui leur donne une tonalité savoureuse tout en accentuant l’anormalité des situations, thème central de Teddy. Qui est anormal dans cette histoire ? Le jeune Teddy qui se transforme peu à peu en monstre ou tous les autres personnages, agressifs dans leur passivité. Ados, les frères Boukherma ont détesté grandir dans un petit patelin, car eux-mêmes en décalage avec leur milieu d’origine et porteur d’une forme de monstruosité – leur gémellité. Adultes, ils sont devenus conscients de la richesse de cette expérience. Ce sont ces deux points de vue, radicalement opposés, qu’ils sont parvenus à retranscrire à l’écran, et qui font tout le sel et le poivre de leur film.
Teddy. De Ludovic et Zoran Boukherma. Interprétation : Anthony Bajon, Christine Gautier, Ludovic Torrent. France, 2020.