Comment raconter Watchmen ? La trame s’avère très complexe dès les premiers épisodes. Watchmen est une oeuvre dont les entrelacs courent désormais sur trois médias différents. C’est d’abord la bande-dessinée d’Alan Moore et Dave Gibbons créée en 1986 en pleine guerre froide. Le contexte politique est important pour la saga qui dépeint la chute de super-héros décadents dans un monde uchronique au bord du précipice. La brillante interprétation de Zack Snyder en 2009 nous laissait avec deux survivants qu’on retrouve ici : Ozymandias, l’homme le plus intelligent du monde, et le Dr Manhattan, le dieu vivant. La série se passe de nos jours dans une réalité où internet n’existe pas et où les policiers sont obligés de travailler masqués. Car la “Cavalerie”, un groupuscule d’extrême-droite, s’amuse à les assassiner. La nuit ou le jour, Angela Abar devient alors “Sister Night”. En enquêtant sur le meurtre du chef de la police, Angela va découvrir un complot visant à détruire le Dr. Manhattan, l’homme indestructible. Celui-ci, en exil sur Mars ou Europa ou partout en même temps, redescend sur Terre parfois, le temps d’aimer une mortelle comme le faisaient les dieux grecs avant lui.
Impossible à résumer et pourtant nous venons de le faire, difficilement. Malgré la blessure infligée par Prometheus, nous sommes désormais prêt à pardonner au scénariste et producteur de Watchmen, Damon Lindelof. Dans le genre fantastique, on n’avait pas vu trame plus ambitieuse à part American Gods première saison. La série ouvre sur un fait historique peu connu malgré son ampleur. A Tulsa dans l’Oklahoma, en 1921, a eu lieu une “émeute raciale”. Selon les sources, on parle de massacre, évoquant 36 à 300 morts parmi la communauté afro-américaine, alors la plus prospère du pays. Dès le début on ne sait pas où va nous mener la série. Un peu comme la BD de Moore et comme le film de Snyder, la série se joue du passage du temps pour exposer chaque personnage avant le cliffhanger de cette saison. Volontairement éloignée de l’oeuvre originale, la série emprunte des sentiers qui bifurquent. Chaque épisode est comme une pièce de puzzle supplémentaire. En fait, Watchmen distille des informations au rythme d’un film noir. Et le résultat final promet d’être monumental.
Watchmen. Créée par Damon Lindelof. Etats-Unis, 2019.