Free state of Jones : les jeux de la faim de l’égalité (pour toujours)

Le réalisateur de Hunger Games enrôle Matthew McConaughey de Interstellar dans un biopic sur un personnage évacué de l’histoire des Etats-Unis. Rencontre post-projection.

En pleine guerre de sécession, dans le Mississippi, le fermier Newton Knight s’engage comme infirmier. Il préfère sauver des vies au milieu de la boucherie. C’est son choix le plus clair, humaniste, éthique. Or, les Sudistes abusent de leurs pouvoirs en taxant sa famille et ses voisins au-delà des dix pour cent que leur octroie leur loi. Newton se révolte. Il est pourchassé, soigné et recueilli par des Noirs marrons dans les marécages. De là, il mène une croisade pour la justice et l’égalité qui ne va jamais s’arrêter même la guerre terminée. Bien que romancée, cette petite histoire exhume un personnage qui a été évacué du grand récit historique de la Guerre Civile pré-états-unienne déjà lui-même romancé.

Nous avons pris le film de plein fouet (les effets sonores sautent plus à la gorge que les effets visuels discrets) lors d’une projection de presse qui a été suivie d’une conversation Skype avec le réalisateur Gary Ross (Big, Pleasantville, Hunger Games) et son comédien Matthew McConaughey (Contact, Interstellar, etc.). La qualité du public de journalistes-blogueurs nous a épargné nos propres interventions (« hé m’sieur, pourquoi est-ce que votre film est co-produit par des Chinois ? »). Dans cet entretien non dénué d’humour, Gary Ross a défendu son projet dont le sujet principal est la lutte des classes plutôt que celle des races, dixit quasiment McConaughey. C’est déjà le thème de son Hunger Games. Mais si Les jeux de la faim a eu l’effet d’une canette de soda, un phénomène pop, Free State of Jones se veut persistant tout comme le projet a persisté dans la tête de son réalisateur pendant plus de dix ans. Le temps et le public décideront de faire du film un de ceux qui laisse des traces quand bien même on a oublié le scénario, les acteurs ou le réalisateur. Comme Mississippi Burning (Alan Parker, 1988), ou Une saison blanche et sèche (Euzhan Palcy, 1989) ou d’autres, réellement relégués dans les limbes. Gary Ross veut ni plus ni moins corriger les mauvaises représentations imprimées par Naissance d’une nation (D.W. Griffith, 1915) et Autant en emporte le vent (Victor Fleming, 1936) et l’histoire officielle. Peu leur importe, et peu nous importe si ce n’est pas le succès de l’année. Parce que #classlivesmatter. Ne vous fiez pas à la bande-annonce.

Free State Of Jones. Réalisation : Gary Ross. Scénario : Leonard Hartman, Gary Ross. Interprétation : Matthew McConaughey, Gugu Mbatha-Raw, Mahershala Ali. Photographie : Benoît Delhomme. Montage : Pamela Martin, Juliette Welfling. Musique : Nicholas Britell. Etats-Unis, 2016. Sortie française le 14 septembre 2016.

Free State of Jones

Free State of Jones : questions à Gary Ross et Matthew McConaughey

Gary, vous aviez cette histoire en tête depuis près de 10 ans, avant même d’écrire le scénario, Matthew vous incarnez un personnage plein de fougue, qu’est-ce qui vous a tous les deux attiré dans cette histoire relativement méconnue ?

Gary Ross (GR) – Je suis très intéressé par l’Histoire en général et cette histoire dont je ne connaissais rien au départ m’a littéralement fasciné. J’ai véritablement été emporté par cette histoire que j’ai étudiée bien davantage que je ne l’avais fait sur d’autres films. Parfois dans la vie on est comme happé par des sujets et c’est le cas ici. Le temps passé à étudier le sujet du film a été presque aussi important que le tournage. C’est un privilège que d’avoir pu faire ce film qui est devenu quelque chose d’important dans ma vie

Matthew McConaughey (MMC) – Tout d’abord je n’avais jamais entendu parler de Newton Knight. Il est inconnu de la plupart des gens dans le monde, et même des Américains. Il y’ avait donc cet homme incroyable durant la guerre de sécession, et cette histoire méconnue, comme oubliée des livres d’histoire. Le personnage de Newton Knight m’a vraiment fasciné. Il avait une telle clairvoyance, une telle compréhension du bien et du mal qu’il n’a pas hésité à sacrifier sa famille, son confort si l’on peut dire, tout ça parce qu’il ne pouvait pas ignorer ce qui se passait et qu’il a tenté rectifier le tir. Sa vision est extrêmement lucide, il s’est dit à un moment : – personne ne devrait avoir de chaînes autour du cou. On doit arrêter ça. Il faut faire quelque chose. Il se devait de réparer les injustices qu’il voyait se produire, et cela en dépit des conséquences que cela pouvait entrainer. Son assurance, sa clairvoyance, sa compréhension de la situation, tout cela m’a vraiment fasciné et attiré dans ce personnage.

GR – Je voudrais rajouter à cela que l’on a du mal de nos jours à concevoir qu’un homme puisse s’engager dans un tel combat avec une telle lucidité d’esprit et aussi dépourvu d’ambiguïté. De nos jours, on cherche de l’ambiguïté, des nuances, des justifications, mais il y’a cent ans quand on parlait de l’esclavage, de la possession d’êtres humains, de l’exploitation de fermiers miséreux afin de maintenir l’esclavage c’était différent, et pourtant les choses étaient très claires pour lui, sans aucune équivoque. Avec le recul du tournage, la sortie du film etc, je réalise qu’il peut sembler difficile de nos jours de comprendre son engagement, sa façon de penser. Le fait qu’un homme aussi simple, aussi pur, aussi courageux puisse risquer sa vie à maintes reprises pour quelque chose qui au fond relevait du principe interroge. A un tel point que beaucoup de gens ont pu douter de sa sincérité. Or il n’y a aucun doute. A la lumière de ce qu’il avait traversé, Newton Knight disait à la fin de sa vie et il ne s’agit pas de savoir si je suis d’accord ou non avec cela, je cite : “si tous les hommes de bonne volonté, les fermiers s’étaient soulevés et avaient abattu tous les propriétaires d’esclaves, il n’y aurait jamais eu cette guerre atroce”. Il en était convaincu.

MMC – C’est exactement ça. Aucune équivoque quant à ses principes et à sa compréhension de la situation. (…) L’absence d’équivoque, sa lucidité sans failles, m’ont donné une vraie liberté dans mon jeu. De nos jours, il y’a tellement de zones grises, de compromis, de paradoxes, de tergiversations sur ce qui est bien, ce qui est mal etc, alors que lui c’était un homme d’action ! Et peu lui importaient les conséquences. En plus je crois en son combat. Il voyait l’humanité telle qu’elle était, pas juste en surface. Il y’avait le bien d’un côté, le mal de l’autre, quelqu’un devait être traité d’une certaine façon, et si un autre n’était pas traité correctement, on se devait de faire quelque chose pour y remédier.

GR – Oui et il faut voir aussi que pour un homme blanc du Sud, un fermier, rallier une telle cause, et s’opposer avec tant de véhémence à l’esclavage, faisait de lui un homme relativement unique pour l’époque. Alors même que son grand-père s’était livré à la traite d’esclaves, lui ne voulait pas d’esclaves, et rejetait complètement l’esclavage. Or pour quelqu’un comme ça de développer une conscience, de poursuivre son combat même une fois la guerre terminée … Il y avait beaucoup de personnes opposées aux Confédérés pendant la guerre, mais de continuer à lutter pour le droit des Afro-Américains dix ans même après la fin de la guerre !

MMC – Exactement. Ca faisait vraiment de lui un “underdog”, un défenseur des opprimés.

GR – Ca fait de lui un homme absolument unique. Ce que montre le film, c’est le besoin sinon le potentiel d’une société unie par ses similitudes et non par ses différences. On me demande quelle leçon j’en tire, or Matthew l’a parfaitement résumé il y’a quelques mois : « une société qui est divisée par le concept de race aurait dû être unie par le fait d’appartenir à une même classe toutes races confondues ». Newton Knight a montré qu’une coalition fondée sur les seules classes pouvait exister. C’était sa conviction profonde, et en cela c’était un homme tout à fait remarquable.

Est-ce que la famille, les descendants de Newton Knight ont été impliqués dans le film ? Et avez-vous été fidèle à l’histoire ou avez-vous pris quelques libertés ?

GR – On a quasiment respecté toute la vérité historique, même si on a pu s’en éloigner parfois. C’est un film, il n’y a pas énormément de documents sur Newton Knight, et aussi afin d’apporter une certaine dramaturgie au film. Néanmoins nous avons minutieusement examiné tous les documents en notre possession. D’ailleurs, j’ai même mis un site en ligne qui recense des centaines de notes et les ressources sur lesquelles le film se base. On a pris quelques libertés pour décrire des situations qui renforçaient la réalité de l’époque, et ce qui s’y déroulait. Par exemple le personnage de Moses n’a pas vraiment existé mais ç’aurait été une erreur d’omettre son personnage, car l’on n’aurait pas autant ressenti la détermination des Afro-Américains à combattre pour leur propre liberté. Et c’est précisément ce que Moses représente en étant un « maroon », (esclave en fuite), qui défie les esclavagistes. Par ailleurs, je pense qu’il était très important d’évoquer son expérience de son point de vue, et plus particulièrement pendant la période de Reconstruction après la guerre. Période pendant laquelle les Afro-Américains ont continué à lutter pour leurs droits. C’est ce que l’on a effectivement inventé dans l’intérêt du film, mais cela raconte une vérité plus profonde à plus d’un titre – que ce soit sur l’Union League Movement, les Maroon Civilizations, l’auto-détermination, l’exigence de leur liberté; cela faisait partie intégrante de cette période. Il y’avait une grande quantité de choses à mettre en lumière, et ç’aurait une omission que de ne pas les inclure dans le film. Alors doit-on parler de fictionnalisation ou bien d’être plus détaillé ? Je pense que c’est être plus détaillé.

Matthew et moi avons donné beaucoup de nous-même pour raconter une histoire méconnue, pour rectifier des erreurs historiques, pour donner existence à des faits oubliés. Je suis très fier qu’un film puisse rétablir une vérité mise à mal dans Autant en Emporte le Vent ou encore dans le film de D.W Griffith : Birth of a nation.

Comment a été reçu le film aux États-Unis avec cette recrudescence des violences policières, qui ont visé plus particulièrement les populations noires et également comment le film a été reçu dans le contexte des élections américaines ?

GR – Franchement, je pense qu’il y a toutes sortes de réactions par rapport au film. Beaucoup l’ont accueilli les bras ouverts, d’autres ont eu plus de mal à apprécier les complexités de la coalition que nous avons précédemment évoquée. Ce qui me convient tout à fait. C’est ce que l’on attend d’un film, que cela provoque des discussions, que ce soit stimulant. En premier lieu, je suis incroyablement reconnaissant, c’est très probablement le film qui a généré le moins d’argent de tous ceux que j’ai faits jusqu’à présent, mais qui a aussi été l’une des expériences les plus satisfaisantes que j’ai jamais eues. Je crois que j’ai appris une chose ou deux sur moi, ce qui m’importe vraiment, et le sens de ce qu’est la satisfaction. La collaboration avec Matthew a été la meilleure que j’ai jamais eue avec un acteur, je suis également fier de l’esprit du film qui subsiste, et de sa portée. Je pense que Pleasantville et Free State of Jones sont mes meilleurs films. Je suis comblé d’avoir pu faire ce film, et qu’il parcourt le monde. Je pense en outre que ce genre de films ne peut pas être jugé au moment de sa sortie. Certains oui, celui-ci non. Pour Hunger Games, cela se définit à sa sortie, car c’est un phénomène culturel, tout le monde veut voir Katniss, le film, la sortie est déterminante. Ici ce n’est pas le cas. Ce qui importe, c’est ce que l’on en pensera dans 5 ans, dans 10 ans. Matthew et moi avons donné beaucoup de nous-même pour raconter une histoire méconnue, pour rectifier des erreurs historiques, pour donner existence à des faits oubliés. Je suis très fier qu’un film puisse rétablir une vérité mise à mal dans Autant en Emporte le Vent ou encore dans le film de D.W Griffith : Birth of a nation. Le temps fera son oeuvre et répondra bien mieux que moi maintenant.

Pensez-vous que votre film sur cet homme si clairvoyant est d’autant plus important au regard du contexte actuel, avec les élections ?

MMC – Absolument. Je pense qu’il comporte des éléments culturels importants et pertinents politiquement, surtout à un moment où notre nation a deux candidats actuellement. Newton était un libertaire en quelque sorte, (s’adressant à Gary) on peut dire qu’il était libertaire non ?

GR – Dans un sens oui, à cela près qu’il se serait battu de toutes ses forces pour les autres, et que les libertaires purs et durs pourraient rétorquer qu’ils veulent juste qu’on les laisse tranquille. Dans sa relation au gouvernement et sa volonté de voir les fermiers modestes devenir complètement autonomes, on peut tout à fait dire qu’il l’était.

MMC – C’est donc un film éminemment pertinent. Et cela même s’il n’a pas rencontré un énorme succès aux Etats-Unis. Tout comme Gary j’en tire une grande fierté. Il gagnera en notoriété avec les années. On peut se perdre en conjectures sur pourquoi le film n’a pas mieux marché. Mais bon c’est un film dont le sujet est intense. Ce n’est pas un film léger sur lequel on discute en gobant du popcorn.

GR – Exactement ! Et l’autre chose c’est que l’on est pas dans le happy-ending absolu, on traite d’une période que les Américains ont découverte dans leurs livres d’Histoire dans le style – la guerre est finie, l’esclavage est aboli et tout est résolu. Mais ce n’est pas exact, ce n’est pas ce qui s’est passé. A peine les esclaves ont été affranchis qu’ils ont à nouveau été réduits en esclavage durant la Reconstruction. Ce n’est pas vraiment un sujet qui intéresse les Américains.

MMC – Qui a envie de sortir d’un film en se disant « maintenant j’ai l’impression que j’ai encore plus de pain sur la planche qu’au moment de rentrer dans ce cinéma ». C’est un film qui vous pousse à vous regarder dans le miroir.

Quelle est votre opinion sur les scènes du procès, qu’est ce qu’elles apportent au film ?

GR – Vous parlez sans doute des scènes qui se déroulent dans les années 40, le procès de Davis Knight. Vous savez, ce procès a bien eu lieu. A l’époque l’arrière petit-fils de Newton Knight a été jugé pour avoir violé les lois raciales de l’état du Mississippi Je pense qu’il était impossible de ne pas les inclure, car d’une part c’était une façon de juger Newton cent ans plus tard et aussi une façon de montrer que les choses demeurent et ne s’effacent pas avec le temps. Je voulais que les spectateurs ressentent cette absence de finalisation, de conclusion. Je ne voulais pas qu’ils aient ce sentiment à la fin du film mais tout au long du film. Il n’y allait pas y avoir de fin heureuse, et on pouvait le découvrir dès le début. La structure de l’histoire est peu conventionnelle et va à l’encontre de ce qu’attendent les gens de l’approche narrative, à savoir une conclusion, une résolution aboutie. Ce film propose une fin ouverte. On sait que l’histoire persiste et cela même cent ans après. J’ai pensé que pour un film de cette nature, c’était quelque chose d’important.

Il y’a toujours un fossé entre ce que l’on veut faire, ce que l’on fait, ce qui est filmé et comment les gens le perçoivent.

C’est une question plus pour Matthew. Depuis ces dernières années vous faites des rôles beaucoup plus profonds, beaucoup plus complets, et du coup je voulais vous demander quel est lequel qui vous a fait le plus grandir, mûrir ? Et aussi sur quels critères vous basiez vos choix dans vos projets, parce que pour le moment je trouve que c’est un sans fautes depuis au moins je sais pas, peut-être quelques années déjà, c’est vraiment un sans-fautes pour moi donc voilà c’est tout.

MMCMerci. Je pense que c’est quelque chose que veut tout artiste. Que notre travail traduise cette intention. Pour que cet homme dise « oh j’apprécie votre travail » c’est la preuve que mon travail est perçu comme il se doit. Vous savez il y’a toujours un fossé entre ce que l’on veut faire, ce que l’on fait, ce qui est filmé et comment les gens le perçoivent. J’ai toujours dit que pour résoudre cela, il faut combler ces fossés. Ça fait partie de mes critères, être aussi proche que possible de mon intention initiale, de ce que je livre et de la façon dont le public le perçoit. Et j’essaie de combler ces fossés dans ma carrière. C’est l’un de mes objectifs et je me sens plus en phase avec mon métier à présent. Il y’a quelque chose que j’ai compris, il y’a environ huit ans où je me suis dit « ne pense pas au résultat. Fais-le pour l’expérience que cela procure. Vis une expérience qui te fera grandir dans la constitution, la création de ton personnage, et dans l’architecture du processus narratif”. Et au final si je parviens à traduire cela dans mon travail, que les gens aiment ; que ça marche au box-office, tant mieux, et si ce n’est pas le cas, je me poserai la question de savoir si je sors grandi de cette expérience. Je pense que les rôles que j’ai interprétés dernièrement m’ont fait grandir. J’ai choisi des rôles dramatiques, qui me permettent d’exprimer toutes les émotions d’un être humain, telles que la douleur, la rage, la tristesse. Je peux toujours me raccrocher à l’humanité de Newton Knight pour mieux saisir ce personnage. Par ailleurs, un autre de mes critères, c’est 1- que j’essaie de faire des films que j’ai envie de voir, qui seraient mon premier choix en tant que spectateur. Et 2- de trouver des personnages, si possibles assez tôt dans le processus, qui me donnent le sentiment que personne d’autre que – moi – ne peut les jouer. Ce sont ces deux critères auxquels je prête attention.

Je voulais savoir si les réalisateurs allaient le (MMC) pousser de plus en plus loin à avoir un accent plus prononcé que jamais, parce que plus ça va, plus on le voit le pauvre avec un accent du Sud terrible ; et on l’a vu dans de nombreux films, alors je me demande où il va s’arrêter avec son accent – voilà c’était une question un peu plus légère.

(…)

C’est une lubie, quelque chose qui est exigée par les réalisateurs ou juste quelque chose qui vous plaît ?

MMC – Non, je pense que ce vous entendez chez Newton Knight est en fait un accent du Mississippi. Ce n’est pas mon accent. Ce n’est pas l’accent texan. L’accent du Mississippi est, plus lent… Le rythme est différent de mon accent du Sud. Ca semble plus peut-être plus sudiste juste parce que c’est le sud profond. En tout cas, c’était la façon de parler de Newton Knight. Plus… « Mississippi ».

Extraits vidéo de la rencontre publique-privée avec Gary Ross et Matthew McConaughey. Merci à Déjà Le Web, l’agence Mercredi et Metropolitan Films Export.


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