Une histoire d’amour sur une plage, avec des cailloux, mais sans Pauline.
Non le cinéma français n’est pas n’est pas nul. Il explore des terrains de l’âme humaine avec la délicatesse d’un médecin de famille pendant que le cinéma hégémonique américain augmente ses budgets dans des fantaisies super-héroïques de moins en moins humaines. Ici, nous avons affaire à un film d’amis, tourné avec une dizaine de personnes. Le schéma est tellement classique de ce cinéma dit d’auteur qui nous a fait chier toute notre adolescence et nous a poussé vers les multiplexes américanisés par besoin d’adrénaline et de rêve. Donc : deux parisiennes louent à un jeune homme esseulé une petite maison en bord de mer. Le jeune homme se prend d’amour pour l’une, qui préfère se laisser séduire par un gendarme local. Pendant que la seconde, plus jeune et jolie, traîne son cafard, et un secret sur une plage caillouteuse.
On a trop dit que le cinéma français était un cinéma d’auteur, qui ne jurait que par le dieu-réalisateur. En réalité, notre cinéma est un cinéma d’acteurs, de troupe comme l’est encore le théâtre. Le peu de moyens, l’économie amicale et de bouts de ficelle parfois, et donc le scénario de ces films les poussent à suivre les traces de Pialat et Rohmer plutôt que celles de, comparons le comparable, Friedkin ou Frankenheimer. Il en résulte que sur cette plage picarde on trouve des moules. Et il y’en a une qui recèle une perle : Vincent Macaigne. Un physique courbé, ni beau, ni moche, une timidité feinte, un « potentiel ». Dans le jargon on appelle ça un acteur ou un comédien. Dans les années qui suivent ce Monde sans femmes, il va d’ailleurs devenir la coqueluche du cinéma d’auteur-réalisateur, qu’on va devoir se taper aussi, pour confirmer ou détruire nos préjugés. Et parce qu’on veut revoir ce Macaigne.
Un monde sans femmes est un film à voir ou à acheter pour plusieurs raisons : il est mieux écrit qu’un livre de la collection Harlequin, et les bonus DVD éclairent sous un autre jour ses conditions de création (les copains aux rôles tournants, la population locale intégrée dans un tournage en 16 mm, etc.). Un court-métrage, déjà hanté par Macaigne, donne le ton du long qui suit. Une promenade de plus dans le jardin touchant de la relation homme-femme.
Un monde sans femmes de Guillaume Brac et Hélène Ruault. Interprétation : Vincent Macaigne, Laure Calamy, Constance Rousseau. Photographie et musique : Tom Harari. France, 2011.