La pub crossmedia dépasse les bornes (NextInpact)
On 31 mai 2014 by rachidouadahPCInpact et Arrêt sur Images ont publié une enquête en novembre 2013 sur une opération de publicité qui dépasse les bornes de la déontologie. Ou comment la « publicité native » va achever la presse.
« Maurice, tu pousses le bouchon un peu trop loin » disait un personnage de publicité qui a marqué la culture collective parce que le petit garçon qu’elle mettait en scène était trop mignon et admonestait son poisson rouge. Ca c’était avant, quand la publicité se contentait d’opérer des inceptions dans l’esprit du consommateur entre deux temps de cerveau disponible. NextInpact et Arrêt sur Images tirent la sornette d’alarme en enquêtant sur les complications d’une campagne de pub de l’opérateur Orange, encore lui, parue en fin d’année dernière. L’agence Marcel (dont le nom fait référence à Marcel Bleustein Blanchet, fondateur historique de Publicis), a conçu une grosse opération de communication crossmedia : affichage, spot télé et radio, intersticiels, bannières, partenariats, websérie, réseaux sociaux, liens sponsorisés, et publi-rédactionnel, etc. Tout irait très bien dans le meilleur des mondes si les partenaires presse de l’opération s’étaient tenus à leur rôle de journalistes plutôt que de servir la soupe à l’opérateur par bols de 10 litres.
[PUBLICITÉ] Tellement rapide que pour @M4GICNoel aujourd’hui est déjà demain.Découvrez son portrait dans Libé demain! pic.twitter.com/riWKLHMifV
— Libération (@libe) 28 Novembre 2013
Parmi ceux qui ont poussé le bouchon trop loin, il y a Libération qui a consacré sa rubrique portrait, en dernière page, au personnage de la pub joué par le comédien Gunther Love (connu pour son élasticité en Air Guitar et accessoirement compagnon de l’animatrice drolatique Daphnée Burki). Il y a eu aussi le webzine Melty – dont le slogan « Le média de la génération Y/Y for Young » nous a toujours fait marrer – qui publie une interview fictive de Gunther. « Ce n’est pas du publi-rédactionnel, j’insiste vraiment là-dessus, s’est défendu Alexandre Masch, PDG de Melty. C’est du native advertising. On ne vend à aucun moment la marque Orange ou les offres de l’opérateur. On fait des interviews de personnages fictifs parce que ça nous fait marrer. C’est effectivement dans le cadre d’une campagne publicitaire qu’Orange nous achète, mais on l’aurait surement fait même sans ça. C’est fun, ça correspond bien à notre ligne, ça nous fait marrer et nos lecteurs aussi. » Lol comme disent les jeunes. Il y a quelques mois, le groupe Melty avait lancé une grande opération de communication destinée à dénicher parmi la jeunesse français, « les Zuckerberg » de demain. Le même, se vante d’utiliser son propre algorithme « qui sert à détecter les tendances qui parlent aux jeunes. Nous les abordons donc en approfondissant les sujets » (interview donnée à Lepetitjournal.com, en juillet 2013).
Quand avons-nous affaire à de la communication et quand avons-nous affaire à de l’information ? Ce mélange existait à une époque et s’appelait du « publi-rédactionnel » : une mention claire et une mise en page légèrement différente laissait apparaître le but d’un simili-article payé par une marque. Mais avec le développement de l’internet et l’affaiblissement économique général de la presse, c’est difficile à dire même après avoir fait le tour des acteurs du métiers concernés par la déontologie de la publicité, déclare le journaliste de NextInpact qui parle alors de « clarté à géométrie variable« . Bien entendu, les publicitaires poussent le bouchon souvent trop loin, mais c’est dans leur nature irréprochable, c’est leur métier. Ce serait comme reprocher à des requins de bouffer des surfeurs imprudemment aventurés dans leur habitat naturel, l’océan. S’il faut retourner un doigt accusateur vers quelqu’un, c’est vers cette presse qui a décidé qu’elle ne vivrait pas de la qualité ou de l’audace de son contenu, mais par la quantité de son audience. Et c’est aussi ta faute à toi, oui toi, le lecteur, tellement habitué à cette culture de la gratuité, toi, si volatile, et si beau à la fois, si libre, comme un vrai surfeur traversant un tube, qu’aucun modèle économique pérenne n’arrive à retenir. Les gourous de la comm’ appelle ce type de publicité « native advertising », ou « publicité native » de sorte qu’elle soit reconnue comme de l’information, ou au pire, du divertissement « fun ». Les journalistes devraient l’appeler par son vrai nom : « la stratégie du coucou ». Pondre ses oeufs dans le nid d’une espèce voisine, attendre patiemment l’éclosion et enfin expulser la couvée légitime, se faire nourrir à la becquée par les parents abusés, grandir et s’en aller recommencer le cycle plus loin. La nature trouvant toujours son équilibre, les espèces parasitées par Cuculus canorus et ses cousins, ont inventé des stratégies de défense en pondant des œufs suffisamment variés pour les distinguer des imitations du coucou, ce dernier adaptant à son tour l’apparence des siens. Une vraie guerre de l’information, qui comme les espèces concernées, n’est pas prête de s’éteindre.
A lire sur NextInpact et Arrêt sur Images.
Archives
- juillet 2021
- juin 2021
- mai 2021
- mars 2021
- février 2021
- décembre 2020
- novembre 2020
- octobre 2020
- septembre 2020
- août 2020
- juin 2020
- mai 2020
- avril 2020
- mars 2020
- février 2020
- janvier 2020
- décembre 2019
- novembre 2019
- octobre 2019
- septembre 2019
- août 2019
- juillet 2019
- juin 2019
- mai 2019
- avril 2019
- mars 2019
- février 2019
- janvier 2019
- décembre 2018
- novembre 2018
- octobre 2018
- septembre 2018
- août 2018
- juillet 2018
- juin 2018
- mai 2018
- avril 2018
- mars 2018
- février 2018
- janvier 2018
- décembre 2017
- novembre 2017
- octobre 2017
- septembre 2017
- août 2017
- juillet 2017
- juin 2017
- mai 2017
- avril 2017
- mars 2017
- janvier 2017
- décembre 2016
- novembre 2016
- octobre 2016
- septembre 2016
- août 2016
- juillet 2016
- juin 2016
- mai 2016
- avril 2016
- mars 2016
- février 2016
- janvier 2016
- décembre 2015
- octobre 2015
- septembre 2015
- juillet 2015
- mai 2015
- avril 2015
- mars 2015
- février 2015
- janvier 2015
- décembre 2014
- novembre 2014
- octobre 2014
- septembre 2014
- août 2014
- juillet 2014
- juin 2014
- mai 2014
- février 2014
- janvier 2014
- décembre 2013
- novembre 2013
- octobre 2013
- septembre 2013
- août 2013
- juillet 2013
- juin 2013
- avril 2013
- mars 2013
- février 2013
- janvier 2013
- novembre 2012
- octobre 2012
- septembre 2012
- août 2012
- juin 2012
- mai 2012
- avril 2012
- mars 2012
- février 2012
- janvier 2012
- janvier 2010